Baba

Tombouctou: Alibi Libi ou le jour du crépissage des Mosquées !

Ce dimanche comme des siècles avant , à Tombouctou, on a procédé à la cérémonie du crépissage de la grande Mosquée de Djingareyber. C’est l’une des trois mosquées inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1988.

Les trois mosquées ( Djingareyber, Sankoré, Sidi Yehia ) , 16 mausolées des saints musulmans et l’ancienne ville appelée la médina, qui est constituée des maisons à l’architecture faite de terre en banco et de pierre locale qu’on appelle Alhor. Voilà ce qui constitue le patrimoine . Aujourd’hui , on découvre une cérémonie qui est partie intégrante du patrimoine immatériel , il s’agit du crépissage de la Mosquée.

Une affaire de corporation 

le crépissage c’est d’abord une affaire de corporation.Comme l’affirme Alassane HASSEY, chef de la corporation des maçons de Tombouctou: depuis des lustres , le crépissage des mosquées revient aux deux grandes familles de maçons. La famille Hamane hou pour la mosquée Djingareyber et la famille Koba Hou la mosquée Sankoré.. Avant  les différends groupes d’ages consacrer pendant trois jours à amasser des gros tas de banco autour de l’édifice ,poursuit -il . Le jour j, généralement un dimanche, le matin de bonne heure, tous les maçons se retrouvent pour prendre le petit déjeuner chez le chef maçon , avant de converger vers la mosquée. Les vieux maçons assis sur de nattes aux côtés des marabouts , supervisent les travaux. Tous les habitants ( fonctionnaires, enseignants , agriculteurs, bouchers…… ) de tout age ,quelque soit leur fonction, viennent,comme on dit ici ,donner de la main.Il est impératif que tout le monde soit pour l’événement. les éventuels récalcitrants se feront passer à l’épreuve d’Alibi libi.  

 Alibi libi  ou l’épreuve de l’enduit de banco

Toutes les sociétés du monde ont une sorte de défouloir, un jour pour vraiment faire les fous, un jour où le roi devient le fou et le fou devient le roi. A Tombouctou, les crépissages des mosquées, donne l’occasion aux habitants d’explorer cette facette de la nature humaine. Alibi libi  est une pratique qui veut qu’après la première phase du crépissage, c’est à dire aux environs de 13 heures, que les amis du même groupe d’age, aillent chercher à leur domicile , ceux des leurs qui n’ont pas été vus sur le site des travaux pour les enduire de banco , principalement sur la tête  en guise de punition. Dans les rues , on pouvait assister à des véritables courses poursuites, entre les plus les jeunes, à la recherche de leurs compères. Les malheureux , qui pensaient échapper à la sentence, en se présentant sur les lieux, font subir une remise à niveau par un véritable Alibi Libi. Le tout ce fait dans un esprit de fête et de camaraderie. Avant que tout le monde ne se retrouve chez  le chef de la corporation pour prendre le déjeuner et prendre du thé.   

Le crépissage du minaret 

L’instant tant attendu est le crépissage du minaret. C’est un moment solennel. Il clôture les festivités car il faut noter que ces dernières se déroulent tout au long de la journée.  Au dehors, devant la mosquée, sont installées les imams, marabouts et officiels. Pendant ces temps, on  n’essaye temps bien que mal d’écarter les enfants alors que  les femmes, installées   loin du groupe des hommes, tambour  à main, galvanisent les  maçons .Tous attendent la venue des  ceux derniers. Quant aux chefs maçons, ils sont sur le toit de la Mosquée en train de superviser l’ouvrage.

Quelques minutes avant le début de la pierre de Maghrib , la corporation de maçons descends du toit pour venir annoncer la fin des travaux aux imams. Ces derniers à leur tour, comme le veut la tradition, leur offrent du thé, du sucre, des dattes et quelques provisions. Avant de conclure, par des prières et bénédictions pour tout le monde.

Baba

 


A Tombouctou, des vendeurs ambulants venus du Bangladesh

On pouvait les croiser sur les grandes artères à Bamako faisant concurrence aux vendeurs ambulants locaux, sur les bords des goudrons. On les croyait cantonner à Bamako et dans certaines grandes villes du Sud du Mali. Mais que ne voit-on pas sous nos latitudes, depuis quelques mois ? L’improbable ! Des dizaines de vendeurs ambulants d’Asie. Ils viennent d’Inde, du Bangladesh ou du Pakistan pour beaucoup. Mais, ici tout le monde les appelle « Indiens ».

Des vendeurs de rue "indiens" à Tombouctou. Crédit : Aubia.
Des vendeurs de rue « indiens » à Tombouctou. Crédit : Aubia.

Car ils ressemblent étrangement aux acteurs des films et séries indiens, ceux de Bollywood. Ces acteurs, qui depuis quelques années ravissent la vedette aux acteurs de série télé nolevas brésiliennes et mexicaines. Pendant que les Occidentaux désertent le nord du Mali, leur gouvernement  nous place en zone rouge, ces « Indiens » sont devenus nos nouveaux touristes. Ces derniers vendent à la sauvette des téléphones portables et autres gadgets. A voir leur attitude plutôt habituelles, comme celles des autres marchands de rue, ils ne semblent nullement préoccupés par le contexte d’insécurité qu’est le nôtre.

Des gadgets chinois pour marchandise

 

Drapés de leur traditionnel habit, gibecière à bandoulière, les mains pleines de téléphones de marque Androïd. Ils arpentent marchés, rues et ruelles. Souvent, ils n’hésitent pas à pousser la porte de l’habitant pour lui proposer leurs gadgets tout droit venus de la Chine.

Alors, vous vous demandez surement : comment font-ils pour communiquer ? Puisque nos nouveaux vendeurs ne comprennent que l’Hindi ou l’Anglais, car  ici très peu des personnes parlent la langue de Molière, et encore moins celle de Shakespeare.

Un marchand ambulant venu d'Asie, au Mali. Crédit : Aubia.
Un marchand ambulant venu d’Asie, au Mali. Crédit : Aubia.

Marchandage en langue des signes

Mais la langue ne constitue nullement une barrière. Car ils s’avèrent être des redoutables négociateurs, il faut les voir en plein marchandage. Ils usent et abusent de tous ce qu’ils ont à porter de mains pour se faire entendre : des onomatopées, des mimes, des signes de la main, expressions  imagées et d’interminables échanges des OUI et des NON.

En tout cas, ici tout le monde achètent ces gadgets. Beaucoup, pour une miette, y trouvent leur compte. Enfin, pour un temps, car gardons à l’esprit que ces objets viennent de la Chine. Ici, il est de notoriété publique que tout ce qui vient de ce pays, a une durée de vie relativement courte. Les plus chanceux n’en profiteront que pendant deux mois au plus.

Pourtant, pendant ce temps, personne ne s’interroge sur les motivations de ces nouveaux hôtes « indiens ». Tout de même, il me paraît étrange de venir se faire de l’argent dans un pays classé parmi plus les plus pauvres du monde, et en guerre. De surcroît, ces vendeurs travaillent souvent dans le grand Nord, l’épicentre où se situe l’épicentre de la crise.


2017 : Futurologie sur le Mali !!!

Il est de coutume à la fin de chaque an de faire une rétrospective des évènements, d’établir un bilan. A la place de la rétrospective, je vous propose de la prospective, un saut dans avenir proche, très proche de notre Mali ; je vous propose de vous amener dans le Mali de 2017.

Politique et gouvernance

Le gouvernement vient d’être remanier. Il est ramené un nombre minimal de 15 ministres. Ils sont choisis après un appel à proposition. Les projets les plus pertinents sont acceptés. Le poste de premier ministre est supprimé. Les ministres sont responsables devant le président de la république Ils viendront à la fin de chaque trimestre faire l’évaluation des actions entreprises. La multitude des conseillers à la présidence est revue à la baisse l’année 2017 vient d’être encore déclarer encore année de lutte contre la corruption. Chef d’état, ministres, conseillers à la présidence et sont astreints à une déclaration des bien avant de prendre leurs fonctions. Le chef de l’état viendra défendre son bilan chaque an devant les députés à l’assemblée nationale, les honorables pourront le destituer s’ils jugent son bilan non satisfaisant. Le chef de l’état visite les régions de Tombouctou, de Gao et de Kidal.

Défense et sécurité

Les attaques et embuscades contre l’armée malienne sont prévenues et repoussées .Les soldats sont requinqués, sur le terrain ils se donnent jusqu’au sacrifice ultime car ils savent que leurs femmes et enfants ne manqueront rien après leur départ. Le ministère de la défense est supprimé. A sa place, il est installé un comité « civilo-militaire » sous la présidence du chef de l’état. Ce comité aura pour rôle de réfléchir à reformer l’armée pour l’adapter aux défis contextuels et géopolitiques mais aussi. La transparence dans l’acquisition des matériels et armements.

Santé

Toutes les régions du Mali sont dotées d’un plateau technique. Les soins de santé sont gratuits et pris en charge par un fonds de solidarité alimenté entre autre, par une taxe imposée sur la production nationale de l’or. Les soins de santé sont pris en charge. Les centres de santé communautaires, présents dans chaque, sont dotés d’un médecin. Les médecins revoient leur salaire augmentes à plus de 100%. Ils ne sont plus obligés de faire de prestations dans les cliniques privées.

Education

Les primaires et les fondamentales sont obligatoires et totalement gratuits. De même que fournitures, livres, et cahiers. Les programmes sont revus et adaptés au contexte actuel. La profession d’enseignant est revalorisée. Un plan de carrière et un salaire satisfaisant leur sont assurés. Les filières débouchent directement sur des emplois car leur fruit répond directement aux besoins du marché du travail. L’état prend en main enseignement supérieur. Il garantit et protège les élections de président des organisations estudiantines. Il lui revient de réunir les meilleurs étudiants afin entre gens civilisés on puisse choisir les représentants à même de défendre intérêt des élèves et étudiants.

Justice 

Les palais de justice sont dotés de moyens nécessaires pour effectuer de travail adéquat. Les usagers y sont bien accueillis et orientés vers le service demandé. Les juges sont indépendants et souverains. Ils disposent des moyens nécessaires pour administrer la justice aux usagers et bénéficient d’une meilleure protection. Le Bureau du vérificateur n’est plus un organe de contrôle, il a de pouvoir de poursuites et des sanctions contre les éventuels corrompus. Les hauts fonctionnaires, à la prise de leurs fonctions montrent patte blanche, doivent justifier tout accroissement des biens à durant et à la fin de leur service. Les prisons d’arrêt se voient dotés des moyens nécessaires pour leur sécurité.

Media et communication 

Les chaines de radio et de télévisions publics sont libérées. Elles recueillent, traitent et diffusent pour le seul bénéfice du peuple malien. Ils refusent la complaisance et sont impertinentes vis-à-vis des gouvernants. Le chef de l’état vient de créer un compte Facebook et twitter et organise régulièrement de plages de questions-réponses avec les citoyens.

 

Baba


« Afrique, un avenir en sursis », mon coup de coeur littéraire

livre baba ali

Ces derniers temps l’une de mes marottes en lecture, que je relis toujours avec le même émerveillement, est l’ouvrage Afrique, Un avenir en sursis des frères Alain T. et Edgard G. HAZOUME, paru en 1988 aux éditions de l’Harmattan.

Ils y faisaient un diagnostic approfondi et pointu de l’état de l’Afrique, dans une belle écriture de beauté et avec le mot juste. Lourdement documenté, avec des  références assez précises, j’ai rarement rencontré  une plume aussi passionnée et acerbe.

Au prologue déjà, on prend en plein figure avec cette lourde affirmation:

Accepter, nous en saisir l’évidente réalité , notre sous-développement, en ce que ses racines prennent naissance aux confins de notre histoire, constitue déjà un gage de salut. L’amorce d’une réflexion véritable, certes douloureuse, mais bénéfique ne s’effectuera qu’en détournant notre regard inquisiteur d’autrui pour le braquer sur nous-mêmes. Nous sommes la clé de nos propres problèmes, et c’est peut- être pour cela que nous redoutons viscéralement une « auto- réflexion »

En même temps on y décèle une violence larvée vis-à-vis de l’Afrique…..La notion de service public est méconnue; ne subsistent plus que des services privés rendus à la carte, selon une foule de facteur dont chaque détenteur de pouvoir est seul juge. La rotondité de la requérante, le volume de l’enveloppe, l’existence de liens familiaux, amicaux ou ethniques et une noria d’autres critères font que ne se posent que des cas distinctifs, des exceptions à la règle. A l’image de leurs gouvernants, les petits confectionneurs ont créé, à leur échelle, un réseau, fait des corruptions et de népotisme, serré et systématique. Ils en vivent et améliorent comme ils peuvent l’ordinaire……..

L’occident aussi n’est pas en reste…..et sans avoir foulé son socle, nous connaissions <<tout>> de la France. Son passé, ses chefs, et ses rois, Dagobert portait sa culotte à l’envers, St Louis rendait justice sous la chêne, ses guerres et ses défaites complaisamment apparentées à des victoires, Waterloo, Austerlitz, ses coutumes et ses mœurs , les frasques de Brigitte Bardot, ses chansonniers à succès, les vêtements et les manies à la mode. Sans l’avoir approché, par l’emboitement d’une multitude d’intermédiaires, livres, rumeurs, médias, presse, globe-trotters, films, nous étions journellement repus de culture française. La France, nous la connaissions. Nous avions la sensation bien qu’étant à des milliers de kilomètres, de vivre dans sa chaude et captivante intimité. Elle était pour nous comme une seconde mère, une nourrice abondante, tenant à nous abreuver de son trop plein de lait culturel. Nous pensions qu’elle aussi nous connaissait. Et pourtant……..

Toutes ces douleurs et tout ce ressentiment se traduisant par une hypertrophie de l’engagement et de la justice


Bamako:entre fanatisme religieux et nationalisme ombragueux

Ce sont des politiciens populistes en mal d’audience,des souverainistes pompeux s’affublant de la soutane de la soutane de la société civile,des religieux politisés,des journalistes instrumentalisés,des « gondwanais » bêtas ne voyant que le doigt leur montrant la lune. Voici à peu près le tableau de la marche du 18 Octobre 2012 à Bamako contre l’intervention militaire de la CEDEAO.C’est-à-dire 24 heures avant la tenue de la réunion du groupe de soutien et de suivi,venu au chevet du Mali

Comment s’expliquer cette opposition contre cette intervention qui serait de nature à libérer les compatriotes du nord sous le joug des djihadistes depuis bientôt huit mois?

Deux raisons pourraient,à mon avis,être à la base de cet état de profonde inconscience.

Au niveau politique,d’une part les partis politiques qui appréhendent mal le jeu démocratique.Ils sont aujourd’hui plus de 130.Pas de projet pour la plupart et bénéficiant de l’aide publique aux partis politiques.Formation et information sont jetées aux oubliettes.Et d’autre part la presse,et principalement les radios privées ou du moins certaines d’entre elles.Profitant de l’abrutissement quotidien que les médias publiques diffusent,s’accaparent de l’audimat.A la clé:désinformation, intoxication, manipulation…..Avec comme corollaire manque d’esprit critique, jamais de remise en cause, pas d’opinion personnelle.

Avec plus de 90% des « musulmans » pas étonnant que guides spirituels, des confréries, des sectes et autres vendeurs des rêves pullulent .Car le terreau s’y prête à merveille: pauvreté, chômage, analphabétisme, corruption, clientélisme j’en passe. Conséquences, des citoyens qui tabassent leur président, qui manifestent contre le port obligatoire du casque, contre la radiation de la fonction publique des faux-diplômés.

Que faire quand on est pris entre ces différentes serres? Difficile de s’en défaire. A moins de faire de cette crise une chance de renaissance d’un nouveau type de malien éveillé aux enjeux socio-politiques et dépourvu de tout dogmatisme politique et religieux.